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Au Kivu, la Chefferie de Buhavu s’engage pour la poursuite de l’Action territoriale Actualités ATEDD-KIVU au coeur de la catastrophe...

KIVU, APRES LES CATASTROPHES, DES REPONSES POUR AGIR...
 

 

Il s’est tenu en date du Mercredi 21 Juin 2023 un colloque sur la problématique des rivières de Kalehe. Ce colloque a été organisé sous le thème « AGIR POUR CONTRÔLER LES INONDATIONS, REBOISER ET DÉVELOPPER UNE AGRICULTURE DURABLE DANS LE BASSIN DU LAC KIVU : Problématique des inondations dans la partie Ouest du bassin du lac Kivu, Territoire de Kalehe, Sud-Kivu ».

 

assistance

Ce colloque a été organisé par le Centre Régional d’Études Interdisciplinaires Appliquées au Développement (CEREIAD) en partenariat avec la Chefferie de Buhavu, CADRE, DCLI-RIEH, Fondation Matendo, CAM, GEV et s’est déroulé sous un format hybride de rencontre : en présentiel et en ligne. 82 personnes se sont rencontrées en présentiel au campus de l’Université Catholique de Bukavu (UCB) à BUGABO, accompagnés de 23 participants qui ont suivi la séance en ligne. La modération de ce colloque a été assurée par le Prof. BAHATI SHAMAMBA, directeur du CEREIAD.

 

RAPPORT DU COLLOQUE ORGANISE A BUKAVU

 

Le colloque a commencé vers 09h25 locales de Bukavu par la présentation de la thématique du colloque, la présentation du projet ATEDD sous lequel les investigations qui font objet de la thématique ont été effectuées ainsi que la présentation des participants.

Après la lecture de l’ordre du jour qui contenait 9 points, le coup d’envoi du colloque a été lancé vers 9h47 par les deux premiers points inscrits à l’ordre du jour à savoir l’hymne national et le mot de bienvenu du secrétaire administratif de la chefferie de Buhavu, Monsieur Claude MAGADJU, représentant sa majesté le Mwami de Buhavu empêché.

Le point suivant de l’ordre du jour a consisté en la présentation de l’agenda du consortium ATEDD. Cette présentation s’est appesantie sur les éclaircissements en rapport avec l’origine de l’initiative d’étude de la problématique des rivières de Kalehe, les motivations d’étude des causes et le besoin d’identifier les solutions ; les premiers partenaires qui ont soutenu l’initiative ainsi que le contexte global initial.

C’est vers 10h08’ que le point de l’ordre du jour portant sur la présentation des résultats préliminaires de l’étude qui a été menée sur la problématique des bassins versants des rivières de la côte Ouest du lac Kivu a été abordée par le Professeur Bashagaluke BIGABWA. Cette présentation comportait trois parties essentielles dont les principales informations sont les suivantes :

 

0. Le contexte de la recherche : il a d’abord été mentionné que cette recherche a été réalisée en 2022, bien avant le drame qui est survenu récemment en mai 2023 à Bushushu et Nyamukubi. La présentation du contexte du milieu s’est résumée en trois points à savoir l’aspect topographique qui est caractérisé par un relief montagneux avec des terrains en fortes pentes ; l’aspect lié à la persistance des catastrophes naturelles marquée par le débordement des lits des rivières, le détachement des roches dans les montagnes en amont et enfin les aspects liés aux difficultés socioéconomiques issues des conséquences de ces catastrophes naturelles. Ces caractéristiques contextuelles ont été à la base de la formulation de la question de la recherche effectuée, question consistant à savoir comment contrôler ces risques environnementaux dont les impacts touchent différents secteurs de la vie.


1. La conception de la recherche (méthodologie de la recherche) : Dans cette partie de la présentation, il a été expliqué que l’étude a utilisé une approche mixte consistant en la prospection, l’observation et la description. L’approche prospective a été utilisée pour faire une analyse spatio-temporelle des différentes variables, tandis que l’approche descriptive a été utilisée pour s’entretenir avec la communauté et les différents acteurs sur les questions liées à l’utilisation des terres, les pratiques et les techniques employées ainsi que les changements observés dans ces pratiques, et les causes de ces changements. Les observations quant à elles, ont été effectuées pour caractériser différents indices liés aux caractéristiques de terrains des basins versant étudiés. Dans cette partie, il a aussi été précisé que cette étude s’est réalisée dans quatre sites à savoir Bweremana (bassin versant de Renga), Minova (Bassin versant de Mubimbi), Kiniezire (bassin versant de Mukana et Ciluluma) et Bushushu (bassin versant de Nyamukubi, Cishova, Lukungula et Nyalunkumo), repartis sur les territoires de Masisi (Nord Kivu) et Kalehe (Sud Kivu).


2. Les résultats de la recherche : Les principaux résultats obtenus ont été présentés en 5 sous-points qui ont consisté en :

a. La caractérisation des différents bassins versants : ici il a été principalement démontré que la plupart des bassins versants caractérisés se trouvaient sur des pentes (supérieures à 16%) impropres aux activités agricoles appliquées sans stratégies efficaces de lutte antiérosive. Il a été signalé la présence des grosses pierres dans les lits de certaines rivières, dans leurs parties se trouvant en altitude et qui constituent des freins à l’écoulement des eaux en plus de représenter des dangers directs pour les populations se trouvant en aval.
b. La caractérisation de la dynamique d’occupation des terres dans chacun des bassins versants : Pour tous les bassins versant étudiés, il a été noté une diminution catastrophique de la couverture forestière allant par exemple de ±90% en 1986 à moins de 1% en 2019 dans le bassin versant de Bushushu, accompagnée d’une augmentation fulgurante des activités agricoles (de 0,7% de champs en 1986 à ±84% des champs en 2022).
c. L’identification des moteurs de la dynamique d’occupation des terres : Parmi les principaux moteurs de la dynamique décrite, l’augmentation de la démographie a été placée en première position avec comme phénomène alarmant, l’arrivée des réfugiés en 1994 qui a créée des besoins importants en espace et en énergie. Aussi il a été mentionné l’érosion du sol qui a été la source de l’augmentation du taux de sédimentation dans les rivières, créant des millions de tonnes de dépôt de sédiments en aval.
d. L’identification des types d’aménagement spécifiques pour chaque rivière mais aussi en général pour la zone investiguée. Dans la partie portant sur les types d’aménagement en général, trois ensembles de mesures ont été recommandées à savoir les mesures mécaniques (par exemple le terrassement etc.), les mesures agronomiques (traçage des courbes de niveau et mesures de lutte antiérosives etc.), ainsi que les mesures de génie civile (maçonnerie, murailles etc.). Ces mesures ont aussi relevé un besoin urgent en arbres pour reboiser les différents bassins versant, une sensibilisation sur l’arrêt de la pratique des feux de brousse et d’une réglementation stricte des activités minières dans les zones situées en amont dans les parties montagneuses du territoire de Kalehe.

 

Comme conclusions, l’étude a souligné le besoin de mettre en place des actions préventives et de les conduire de façon intégrée en associant et en mobilisant tous les acteurs et parties prenantes. L’étude a aussi mentionné le besoin de mettre en place des mesures d’intervention qui tiennent compte du degré de sévérité des risques dans chaque bassin versant. Plusieurs mesures importantes ont été définies parmi lesquelles un reboisement à grande échelle, le curage des rivières et l’augmentation de leurs lits, l’installation des buses sur les routes, etc.

 

Cette présentation des résultats de l’étude conduite a pris fin vers 11h10 et a laissé la place à la séance des discussions par des questions-réponses. Les principales questions formulées par les participants sont les suivantes :

  • Quelles sont les démarches envisagées pour que les résultats soient pris en compte au niveau national et international ?
  • Qu’en-est-il des données sur la géo-séismicité et son rôle potentiel comme origine des crues ? comment penser le reboisement (quelles espèces pour quels bassins versants ? quelles parties prenantes ?), pourquoi une étude intégrale de tout le réseau hydrographique de la région n’a-t-elle pas été effectuée ?
  • Quelle est l’origine des grosses pierres qui encombrent les lits des rivières et quelles solutions envisagées pour que la pratique de feu de brousse soit abandonnée ?
  • L’étude s’est focalisée sur le littoral, qu’en est-il de la situation dans les hauts plateaux ? ne sommes-nous pas en train de nous attaquer aux conséquences plutôt qu’aux causes ?
  • Comment le gouvernement provincial envisage résoudre la problématique du foncier qui se pose ?
  • Quelle est la faisabilité de la mise en place d’un système d’alerte précoce
  • Le reboisement serait-il vraiment efficace compte tenu de la fragilité topographique (des grosses pierres qui peuvent se détacher et rouler à la suite d’un petit tremblement de terre).

 

Après ce jeu de questions-réponses qui a duré une quarantaine des minutes, une pause-café d’une trentaine des minutes a eu lieu, puis s’en est suivie une présentation du projet ATEDD (Action Territoriale pour un Développement Durable au Kivu), projet sous lequel l’étude présentée ci-haut a été réalisée. Dans cette présentation, donnée par le Prof. Aimé HERI-KAZI BISIMWA, il a été mentionné que le projet ATEDD a été lancé le 27 Novembre 2021 avec l’appui du FID et avait trois domaines d’intervention à savoir : la maitrise du cours des rivières, le reboisement et la promotion des alternatives au bois énergie ainsi que de l’agroécologie, le développement des filières rentables et la lutte contre la malnutrition. Ce projet pilote a ciblé 4 sites dont Bweremana, Minova, Kiniezire et Bushushu. Le financement de ce projet s’est déjà terminé et les activités ont déjà fait l’objet d’un transfert aux autorités locales dont le pilotage est effectué par l’intermédiaires des Comités Locaux de Développement (CLD).

 

Lors de cette présentation, les principaux intervenants dans ce projet, Monsieur Michel TISSIER et Gilbert MASUMBUKO sont aussi intervenus pour parler des perspectives et des mobilisations pour la suite du Projet ATEDD. Ils ont parlé de la durabilité des actions par l’intégration et l’appropriation des initiatives, du soutien des initiatives locales dans les actions qui dépassent la possibilité de différents acteurs locaux, de la nécessité d’une bonne mobilisation locale d’abord puis d’autres acteurs ainsi qu’un besoin d’une coordination efficace de la part de la chefferie.

 

Après cette séance, un ensemble de trois interventions de la part des membres du gouvernement provincial ont eu lieu 

  • Une première intervention du Prof Mubalama ZIBONA, représentant du gouverneur de Province empêché. Son intervention a porté sur le débat autour de la délocalisation des populations sinistrées de Bushushu et Nyamukubi : les aspects importants à prendre en compte à savoir les aspects culturels ainsi que la disponibilité des terres. Il a aussi parlé des sites qui ont été identifiés comme immédiatement disponibles à cette fin : le site de MUSHONEZO qui est une concession sous bail mais non mise en valeur et dont l’Etat pourrait récupérer et réaffecter ; la concession de LWAKO qui est un ancien aérodrome.
  • Une deuxième intervention de Madame Furaha BYABUZE, commissaire en charge des affaires sociales du gouvernement provincial du Sud-Kivu. A travers son intervention, elle est revenue sur l’ampleur et le bilan des catastrophes et a rappelé l’importance d’épuiser la soif d’identification des solutions efficaces pour résoudre durablement ce problème.
  • Une troisième intervention de Me Notien KAZUNGUZIBWA, commissaire général du développement dans le gouvernement provincial du Sud-Kivu. Son intervention a insisté sur la sensibilisation des populations sur leur responsabilité et le rôle qu’ils doivent jouer pour éviter que les problèmes pareils ne surviennent dans le futur.

 

Après ces trois discours, une pause de trente minutes a eu lieu, suivie des travaux en carrefours où 4 groupes ont été formés. Après ces travaux en carrefours, une restitution des résultats des travaux a été effectuée suivie d’une synthèse des résolutions retenues, secteur par secteur, comme engagements des uns et des autres.

Pour chacun des secteurs, les engagements suivants ont été retenus :

-  Secteur des forêts : reboisement et sensibilisation sur l’abandon des mauvaises pratiques
- Secteur de l’agriculture : promotion de l’agriculture durable (l’agroécologie) à travers ses différents paquets technologiques.
- Secteur de l’élevage : Sensibilisation sur la collaboration entre agriculteurs et éleveurs pour éviter les conflits, éviter le feu de brousse, éviter le creusage des fossés de séparation des pâturages en amont ainsi que la vulgarisation sur l’intensification des cultures fourragères.
- Secteur des mines : La sensibilisation à la restauration des zones dégradées, limiter l’octroi des permis d’exploitation minières et le suivi quotidien de la part de l’État sur les sites abandonnés
- Secteur du climat : Pratique des méthodes de lutte contre le changement climatique par le reboisement et toutes les pratiques pouvant avoir un rôle à y jouer
- Secteur de la démographie : La sensibilisation des ménages à l’adoption d’un planning familial.

 

Les différentes parties prenantes ayant pris part au colloque (Autorités étatiques, pouvoir coutumier, structures étatiques, partenaires techniques et financiers, organisations de la société civile, chercheurs et institutions d’enseignement supérieur et universitaire) ont pris la résolution de respecter chacun à son niveau ces différents engagements, dans le but de prévenir à l’avenir les dégâts liés aux inondations des rivières à Kalehe et ailleurs au Sud Kivu.

 

Commencé vers 9 heures locales, le colloque s’est terminé vers 16h30 par le mot de clôture du Gouverneur de Province du Sud Kivu, lu par commissaire en charge des affaires sociales et le chant de l’hymne national.

 


Bahati Shamamba Dieudonné, PhD
Faculté des Sciences agronomiques
Université Catholique de Bukavu (UCB)

 

 

 


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