"Pour un développement humain, intégral, solidaire et participatif, en harmonie avec le vivant"

 
 
 
 
 
 
 
 

Economie sociale et économie humaine selon Jean-Pierre Binamé et Jacques Briard, d’Eglise-Wallonie Toutes les actualités INHE ASIA ** COVID-19 ** Lettre à nos membres continentaux

« La Covid-19 et les ODD, opportunité ou menace ?»
 

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Intervention de Michel Tissier

en ouverture du Forum d’Economie humaine de Valencia du 17 juin 2020

 

" Ces dernières années, le pourcentage de la population qui souhaite un modèle économique plus durable et humain a considérablement augmenté. En conséquence, le processus de transition vers un nouveau paradigme plus humain et durable s'est accéléré. La preuve en a été l'approbation des objectifs de développement durable (ODD) des Nations Unies en janvier 2016.

La crise économique et sanitaire actuelle nous place face à un nouveau scénario très complexe.

Bien que la pandémie de coronavirus ait permis de mettre en évidence la non-durabilité d'un système économique basé sur la compétitivité et la maximisation des avantages, le ralentissement économique qu'elle provoque peut devenir le prétexte parfait pour adopter des mesures économiques et politiques qui représentent un recul des engagements internationaux adoptés dans le programme 2030 et l' accord de Paris sur le changement climatique. "

 

Le groupe Economia humana, que nous avions déjà rencontré à Barcelone, a organisé une visio-conférence (temps de confinement mondial oblige !) sur le sujet en se posant les questions suivantes : 

Comment Covid affecte-t-il le Programme 2030 ? Quels sont les risques et les défis actuels ? Comment continuer à progresser dans les ODD ?

A cet occasion, il a invité Michel Tissier, secrétaire exécutif du RIEH à ouvrir les débats; Ce fut l'occasion de présenter le Réseau, dans sa définition et ses actions. 

 

 

 

 

 

Bonjour,

 

Je remercie nos amis du groupe Economia humana qui ont organisé ce forum et m’ont invité à y participer. Depuis quelques mois Economia humana fait partie de notre Réseau international pour une Economie humaine dont je suis le secrétaire exécutif.

 

Le RIEH est présent en Afrique, en Asie, en Amérique latine et en Europe. En Amérique latine il est animé par le CLAEH, Centre Latino-Américain d’Economie humaine, de Montevideo en Uruguay dont mon ami Andrés Lalanne est le recteur. Andrés, je sais que tu nous écoutes et je te salue ainsi que nos amis présents dans 12 pays d’Amérique latine.

 

Ce réseau a quatre caractéristiques :

 

  • Il fait référence à l’économie humaine, comme perspective et comme démarche pour transformer le monde.
  • Ses membres veulent à la fois se transformer eux-mêmes, transformer leur territoire de proximité, là où ils vivent et travaillent, transformer les structures qui déterminent la vie des personnes et des peuples.
  • Ses membres veulent à la fois agir et réfléchir, tirer les enseignements de leur action pour participer à l’organisation des sociétés dans lesquelles ils vivent.
  • Il est international, en voulant à la fois que notre humanité sache s’organiser pour faire face aux défis communs et fasse place à la diversité des cultures et des civilisations.

 

 

Référence à l’économie humaine

Nous donnons au terme Economie son sens large qui est son sens originel : l’organisation de notre maison commune pour répondre aux besoins de ceux qui l’habitent. Dans ce sens large, l’économie n’est pas si loin de l’écologie, si celle-ci comme le dit le Pape François dans l’encyclique Laudato si est une écologie intégrale, à la fois naturelle et humaine. Pas loin non plus de la politique, si on désigne par là non pas seulement l’exercice du pouvoir mais la façon de s’organiser pour vivre ensemble.

 

Et finalement, la vision des porteurs de l’économie humaine est toute simple et dans sa simplicité constitue une critique radicale de nos sociétés et du monde :

- Non l’économie, n’a pas pour objet de produire de plus en plus de profit, mais de répondre aux besoins humains, à tous les besoins dans leur diversité et aux besoins de tous.

- Non la politique n’a pas pour objet d’exercer le pouvoir au profit d’un groupe de privilégiés mais de déterminer ensemble ce qu’est le bien commun et d’agir ensemble pour le servir.

 

Economie du bien commun, politique du bien commun, écologie intégrale  sont d’autres noms de l’économie humaine.

 

Etre porteur de l’économie humaine, c’est promouvoir cette vision et c’est aussi une démarche. On ne peut transformer la société qu’avec et par les personnes et les groupes concernés.

 

D’où les deux piliers de l’économie humaine que sont l’éducation et la démocratie :  

- L’éducation, pas seulement au sens du système éducatif initial pour les enfants et les jeunes, mais tout au long de la vie et par tous les canaux permettant aux personnes et aux groupes d’être conscients et d’agir consciemment. Une éducation émancipatrice. Et beaucoup des membres du RIEH sont des organisations d’éducation populaire.

- La démocratie, qui est bien sûr une façon de désigner des représentants pour exercer le pouvoir et un état de droit respectueux des libertés, mais qui est aussi l’ensemble des processus nous permettant de faire des choix collectifs sur tous les enjeux communs, y compris les enjeux économiques, sociaux et culturels.  Et beaucoup des membres du RIEH sont des organisations d’animation de la vie démocratique.

 

Pour progresser vers les ODD, éducation et démocratie sont essentiels. Ce sont toutes les composantes de la société qui doivent se les approprier et se mobiliser pour les atteindre.

 

 

Se transformer soi-même, transformer son territoire, transformer le système

C’est la combinaison de ces trois niveaux qui nous paraît importante. Je mets juste l’accent sur le niveau du territoire car le RIEH lance actuellement une recherche-action sur les conditions dans lesquelles, au niveau local, il est possible d’organiser une concertation de tous les acteurs, la société civile, les acteurs économiques, les acteurs culturels, les pouvoirs publics pour que la population du territoire vive mieux. C’est d’ailleurs une proposition que nous faisons par rapport aux Objectifs de Développement Durable : que se constituent au niveau local des comités d’action concertée pour les ODD.

 

 

Agir et tirer les enseignements de l’action

Nous avons des membres qui sont d’abord tournés vers l’action, d’autres vers la réflexion. Mais ce qui nous caractérise, c’est l’articulation entre les deux et nous donnons à cette articulation le nom de recherche-action.

 

 

Un réseau international

Les ODD concernent tous les pays, même si on les présente trop souvent comme n’ayant du sens que pour les pays pauvres. La pandémie de Covid-19 est la démonstration éclatante que nous sommes tous interdépendants.

Notre réseau promeut donc la capacité à agir ensemble et solidairement au niveau mondial et de la planète.

Mais il est aussi attaché à la diversité culturelle et c’est cette articulation entre l’universel et les civilisations  telles que l’histoire les a constituées que nous cherchons à mettre en avant.

 

 

Des actions de terrain qui font levier

Pour illustrer ce qu’est le Réseau international pour une économie humaine et dire quelques mots sur le sujet de cette conférence, je peux présenter ce qu’ont été les axes d’action de membres du RIEH dans la crise du Covid-19.

 

  • Tous ont salué que s’affirme dans leur pays la volonté politique de prendre des mesures fortes pour lutter contre l’épidémie et sauvegarder la santé. C’est bien l’homme et non pas les intérêts économiques qui a été privilégié.

 

Toutefois les politiques mises en œuvre par les gouvernements ont été critiquées sur trois points essentiels et liés entre eux selon le référentiel de l’économie humaine :

 

  • Il faut garder une approche globale des besoins humains et les enjeux sanitaires ne peuvent pas être séparés ni des besoins élémentaires de survie, ni des besoins sociaux et culturels. Dans les bidonvilles et dans les camps de réfugiés il faut échapper au virus, mais aussi à la famine. Les personnes âgées doivent être protégées du virus, mais elles doivent aussi garder le contact avec leurs proches. Les migrants internes de l’Inde ne doivent pas être matraqués quand ils veulent revenir dans leur village et leur Etat d’origine, mais au contraire être accompagnés.
  • Il faut prendre des mesures adaptées à la situation de toute la population et pas seulement à celle des catégories aisées. Cela doit conduire à aménager les conditions de confinement pour poursuivre la production et la distribution de biens essentiels, notamment les denrées alimentaires
  • Il faut impliquer les organisations de la société civile et les autorités locales dans la gestion de la crise. Même si certaines mesures ne peuvent relever que du pouvoir d’Etat comme les mesures générales de confinement ou déblocage de fonds publics par la création monétaire, c’est au contact direct de la population qu’on peut identifier les problèmes, mobiliser toutes les bonnes volontés et trouver les meilleures solutions.

 

Et les membres du réseau n’ont pas seulement lancé des appels aux autorités. Ils se sont impliqués directement dans l’action sur leur territoire :

 

  • Pour informer les populations sur les mesures de protection et lutter contre les fausses nouvelles,
  • Pour organiser la solidarité : fournir à manger aux personnes risquant de mourir de faim, visiter les personnes isolées et répondre à leurs besoins, suppléer à l’absence de services publics,
  • Pour fournir des équipements pour les personnels faisant face au virus : les personnels soignants, mais aussi ceux des services sociaux, ceux aussi des forces de l’ordre chargées de faire respecter les mesures de protection
  • Pour organiser la concertation sur leur territoire, en lien avec les autorités locales.

 

Vous voyez à travers ces exemples que bien des personnes et des organisations partagent les convictions et les engagements des porteurs de l’économie humaine. Nous les invitons à participer à la réflexion et à l’action de notre réseau, notamment en format des groupes locaux comme ceux qu’anime Economia humana en Espagne.

 


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